Alors que le Stade Rochelais s’apprête à affronter ce samedi (16 h 30) l’ASM Clermont Auvergne dans le cadre du Top 14, petit retour en arrière sur ce qui fut la première grande histoire européenne des Maritimes, qui se termina par une confrontation face aux Jaunards.
15 avril 2018, stade Marcel-Deflandre. Vaincus 26-18 sur leur pelouse, les coéquipiers de Jason Eaton quittent le top 6 en faveur du vainqueur du jour, le Castres Olympique. Personne ne le sait encore mais ce match scellera le sort des deux équipes pour la fin de saison, le CO vers son quatrième Brennus et les Jaune et Noir aux portes du top 6, les privant de phases finales mais aussi de Champions Cup.
L’intersaison 2018 passée, La Rochelle se présente avec quelques changements. L’entraîneur historique Patrice Collazo est parti à Toulon et Jono Gibbes est devenu le directeur sportif du club. Brock James est remplacé à l’ouverture par Ihaia West alors que des Wiaan Liebenberg, Rémi Bourdeau ou Arthur Joly débarquent en Charente-Maritime.
Une poule abordable
En étant placés dans le chapeau 1, les Rochelais savaient qu’ils partaient favoris de leur groupe mais la triplette Ienisseï-Zebre-Bristol se présentait comme l’une des plus simples. Ienisseï (Russie) est l’un des petits poucets des compétitions européennes, les Zebre souffre des limites du rugby italien et les Bristol Bears, principal adversaire des Maritimes, sont tout juste promus de deuxième division anglaise.
Les résultats s’accordent avec les attentes. À Krasnoïarsk, le Stade Rochelais inscrit douze essais, pour finir avec 82 points. Une semaine plus tard à Marcel-Deflandre, les Sibériens encaissent 64 points. C’est au mois de décembre, pour la double confrontation face aux Bears, que les Jaune et Noir jouent leur première place.
Bien aidés par la défaite des Anglais à Parme un peu plus tôt, une victoire suffit pour avoir un matelas suffisant sur la deuxième place. Au Ashton Gate Stadium, les coéquipiers de Victor Vito assurent avec un succès 22-35. La défaite 3-13 à Deflandre avec une équipe très remaniée ne change rien. Avec 4 points d’avance, la qualification des Maritimes pour les quarts de finale semble en très bonne voie.
Deux matchs contre les Parmesans, des victoires 32-12 à Deflandre et 10-22 au stadio Sergio-Lanfranchi, confortent la première place du Stade rochelais, devant des Bristol Bears qui terminent dans les meilleurs deuxièmes. Et le hasard du règlement oppose La Rochelle à… Bristol.
Une phase à élimination directe à l’accent anglais
Trois mois et demi après la seule défaite européenne de la saison, les Rochelais retournent à Marcel-Deflandre, face à des Bears qui ont la volonté de frapper un grand coup. Mais sous le soleil de La Rochelle, les hommes de Jono Gibbes ne laissent aucune chance à leurs opposants.
Un essai de Greg Alldritt, encore flanker à ce moment-là, juste avant le quart d’heure de jeu, suivi d’un essai de pénalité grâce à la surpuissante mêlée rochelaise. Cinq minutes plus tard, une percée de Vincent Rattez aboutit à un essai de Geoffrey Doumayrou qui fait grimper le score de 3-0 à 24-3 en l’espace de quinze minutes. Malgré un essai anglais, l’intenable Rattez élimine trois anglais et transmet à Wiaan Liebenberg pour alourdir le score juste avant la pause. 29-10 à la mi-temps, le match semble déjà plié par des Rochelais bien plus efficaces, malgré 35 % de possession.
En seconde mi-temps, le score ne bouge quasiment plus et il faut attendre les dix dernières minutes pour voir de nouveaux essais. À la 72ème minute, Rattez conclue sa prestation par un essai somptueux, tel un point d’exclamation à la performance rochelaise. Un ultime essai anglais en fin de match ne fera que réduire l’écart. Les Rochelais s’imposent assez largement et logiquement sur le score de 39-15 et retrouveront les Sale Sharks en demi-finale à Deflandre.
Pour ce qui est du centième match de Levani Botia sous les couleurs rochelaises, le stade Marcel-Deflandre accueille des Sale Sharks prêts à vivre une nouvelle finale européenne, eux qui ont déjà remporté le Challenge européen à deux reprises.
Le début de match fait très vite comprendre aux supporters présents que la partie ne sera pas une sinécure. Les Jaune et Noir peinent à avancer contre des Sharks bien plus mordants. Au bout d’un quart d’heure de jeu, un essai de pénalité est accordé aux visiteurs, Victor Vito étant sanctionné d’un carton jaune pour avoir volontairement fait écrouler le maul.
Mais malgré l’infériorité numérique, Ihaia West trouve une superbe diagonale au pied pour Rattez qui ne peut aplatir. C’est toutefois un essai de pénalité qui est accordé aux Rochelais, le plaquage haut de Denny Solomona empêchant Rattez de marquer. Sale est à 14 et La Rochelle de retour à 15, la domination s’inverse. Trois minutes après le dernier essai, une superbe feinte de Kini Murimurivalu permet aux locaux de repasser devant au score. Mais comme les Rochelais dix minutes plus tôt, c’est à 14 que Sale réussit à revenir au score. Le score est donc de 17-17 à la mi-temps, rien n’est encore joué.
La deuxième période s’avèrera néanmoins bien plus calme que la première. C’est à la 50ème minute que l’essai de la victoire est marqué, avec une passe sautée de West vers Alldritt en position d’ailier qui conclut. Une pénalité de Sale à dix minutes du terme et un carton jaune de Jules Favre à la 80ème vont faire monter la tension cardiaque des supporters rochelais. Mais une mêlée anglaise écroulée suite à la pression d’Arthur Joly permet au Stade Rochelais de vivre la première finale européenne de son histoire, au St James Park de Newcastle, face à l’ASM Clermont Auvergne.
Trop légers, trop inexpérimentés
10 mai 2019, la victoire face au RCT une semaine plus tôt a fait passer le Stade Rochelais de la sixième à la quatrième place du Top 14. Face aux Maritimes, l’ASM, deuxième du championnat depuis de longues semaines et unique club à faire croire à une concurrence face à l’ogre toulousain.
En championnat, les deux équipes ont battu l’autre à domicile et même si les Clermontois sont devant au classement, les Rochelais ont montré de très bonnes choses durant la saison. Hélas pour ces derniers, l’expérience des grands matchs des Auvergnats va se faire sentir.
Le match commence avec une très grosse intensité mais il faudra néanmoins attendre plus de dix minutes de jeu pour voir le score bouger, grâce à une pénalité de Morgan Parra, située à 30 mètres. Sa blessure quelques minutes plus tard force l’entrée de Greig Laidlaw, qui inscrit une autre pénalité à la 24ème minute, à laquelle Ihaia West répond. À la demi-heure de jeu, le score n’est que de 6-3 quand sur un moment fort clermontois, Isaia Toeava décale Damian Penaud. Ce dernier fait parler sa vitesse, échappe au plaquage de West et inscrit un essai, transformé par Laidlaw. La pénalité de West à la 35ème permet aux Rochelais de recoller. Mais les attaques des hommes de Jono Gibbes n’aboutissent pas, la solide défense clermontoise réussissant toujours à empêcher l’essai.
13-6 pour Clermont à la mi-temps, dans un match intense où les deux équipes se rendent coup pour coup, avec des Clermontois qui auront réussi à inscrire un essai. Au retour des vestiaires, West permet à La Rochelle de passer quatre points supplémentaire, mais heurte le poteau sur une autre pénalité. L’ASM s’appuie davantage sur son demi d’ouverture et profite des fautes rochelaises pour inscrire des pénalités et des points faciles.
Le tournant du match est à l’heure de jeu, quand sur un ballon porté après une pénaltouche, le maul clermontois fait exploser la défense maritime. Essai de Fritz Lee transformé par Laidlaw. L’ASM prend le large et mène désormais 26-9. L’essai d’Atonio cinq minutes plus tard offre une once d’espoir aux supporters rochelais. Les Maritimes proposent du jeu et mettent à mal la défense auvergnate mais sans la faire craquer. Une merveille de coup de pied rasant de Camille Lopez offre à Wesley Fofana l’opportunité d’aplatir entre les poteaux. Laidlaw continue son 100% au pied. 33-16, le vainqueur est connu.
Une ultime pénalité de Laidlaw à la 80ème alourdira la marque à 36-16. Mais plus encore que ce que le score pourrait faire croire, c’est la puissance et le réalisme des Clermontois qui leur aura permis de l’emporter. La Rochelle aura pu faire étalage de ses intentions de jeu et s’incline la tête haute. Malheureusement cela n’aura pas suffi face à la machine de guerre auvergnate qui aura gagné grâce à son expérience et sa discipline.
Pour les deux équipes, il restait encore le Top 14. La Rochelle finira cinquième et ira battre le Racing à Yves-du-Manoir, alors que Clermont prendra le meilleur sur le LOU à Bordeaux. Mais le bourreau des deux équipes sera le Stade toulousain, qui écrasera d’abord les Rochelais en demi-finale (20-6) avant de remporter un nouveau Brennus face à l’ASM au Stade de France sur le score de 24-18.
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